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Horreur !À mes yeux hagardsUn troisième Monstre surgit.Le corps énorme d’un cochonTout rond,Faisant craquer de lard sa peau obscène,Et vautrant sa rose bedaineDans la boue et dans le sang.Devant,Quatre gueules de chacalsAux yeux crevés.HurlantFérocement à la Haine.Et derrière, héroïquement,Sur son cul de porc s’élevaitLa queue en panache de gloireHistorique du grand chevalDe bataille à travers l’Histoire.-- Et tout cela, ma Nuit d’Été,Peut-on le croire,Je le voyais dans ta Clarté ! —Les gueules de Chacals faisaientUne assourdissante clameurDiscordanteDe rauques hurles d’épouvante.L’une disait :« À la guerre ! À la guerre !« Mon brave soldat féodal.« Ton prince est le meilleur des princes,« Car il est ton prince natal.« C’est pour lui que mourut ton père,« Et de ses pères tes aïeux« Furent esclaves bienheureux.« Allez, enfants de la province,« Mourir pour la gloire du Prince. »Et chaque hurle accompagnaitUn coup de croc dans les charognes.Pendant ce temps, l’autre clamait :« À la guerre ! À la guerre !« Bons Patriotes, aux frontières !« Écoutez la bonne Nouvelle !« Votre grand Empereur conquérant« A besoin de votre sang« Pour écrire au livre d’histoire« Sa plus belle page de gloire.« Laissez mères, femmes, enfants« Et partez. La Mort vous appelle« Au Champ d’Honneur.« Héroïque foule immortelle,« Sacrifiez-vous pour l’Empereur ! »Et, à chaque coup de sa gueule,Du sang ruisselait sous la Lune.La troisième encore plus fortHurlait sa chanson de Mort.Et j’entendais :« À la guerre ! À la guerre !Citoyens de la République…Fils fortunés d’un libre PeupleAux traditions démocratiques.Vos ancêtres ont su se battreEt mourir au son du canonPour faire inscrire en lettres d’orSur tous les murs de vos Cités,Ceux des prisons.Ceux du Palais présidentiel.Sur ceux des Asiles nocturnesEt sur les murs de vos théâtresPartout, cette unique formuleProvidentielle :Liberté, Égalité. Fraternité.« Divin principe ! Précieux bienPour les cœurs de républicains !« Ô Citoyens,Vous êtes tous égaux et frères.Alors, qu’importe la misèreOu le pouvoir ou la fortune.Quand on est Peuple Souverain,Tous égaux en droit devant l’UrneMagique,La Sacrée Urne ÉlectoraleOù, comme par enchantement.Tous les rêves et toutes les faims.Toutes les souffrances d’hierEt tous les espoirs de DemainEt toutes les révoltes fières.Passant par les ardentes braisesDu feu social.Aux sons de la « Marseillaise »Se fondent en un seul métalDe bon airain patriotiquePour les mitrailles héroïquesDe la Défense Nationale.« Dansez la Carmagnole,Vive le son, vive le son !Dansez la Carmagnole,Vive le son du Canon !« Vous êtes dans la tradition,La tradition républicaine,La pure tradition de vos frèresAux temps de la Révolution,La tradition de vieille haine.« Allez ! enfants de la Nation.Formez vos bataillons.Sus à ces hordes ennemiesDéfendez la belle PatriePour laquelle moururent vos pères.Frappez, tuez, le goût du sangEst un des biens héréditairesQue la Patrie mit dans les veinesDe vos ancêtres, mes enfants.Aux temps de la Sainte TerreurEt des guerres républicaines.« Abreuvez de sang les sillonsÉventrés des immenses plaines.Votre patrie a soif de sang.C’est la guerre. Profitez-enPour assouvir cette passionDe meurtre qui brille vos veines.Ô Soldats de la République,Assassinez sans haut le cœur ;Goûtez le plaisir ineffableDe pouvoir tuer son semblableAu nom des lois, impunément.Soyez des soldats héroïques.« À la baïonnette ! En avant !Assassinez pour la Patrie.Plongez vos armes dans les chairsPalpitantes de jeune vie.« Fauchez les corps vigoureux ! FaitesAmple moisson de regards clairs ;Piétinez la vendange humaine ;Abreuvez les sillons de sang.« Et puis, ayant atteint ces faîtesDe l’héroïsme militaire,Mourez à votre tour, laissantVos charognes nourrir les plainesImmenses de votre patrie.« La République vous appelle.Sachant vaincre, sachez périr.Un Français doit vivre pour elle.Pour elle un Français doit mourir. »Ainsi,L’Aboyeur sinistre hoquetaitComme un homme ivreSes stupides parolesDe Mort,En vomissements d’un sang lourdPuant l’alcoolEt la pourriture immondeDes héréditaires véroles.Et cependantC’était ton temps.Minuit d’Amour,O cœur voluptueux du MondeBattant au rythme de l’ÉtéLa Joie de Vivre !…La quatrième Gueule de Chacal,À son tour.Entonnait son refrain de Mort :« À la guerre ! À la guerre !Défenseurs de l’Humanité !« Au chant de 1’« Internationale »Formez vos nouveaux bataillons !Vous êtes les soldats du DroitEt de la Civilisation !Dressez, contre la BarbarieDes jeunes peuples réfractairesÀ votre Loi,Vos canons lançant leur furieDe bonne Mort humanitaire !« Mitraillez la race mauditeDe ces Barbares au poil rouxNégateurs de vos beaux principes.Mitraillez ces brutes, ces fousQui clament que la Force est toutEt que le Bon Droit est un mythe.« Exterminez ! Pas de pitié !Vous pouvez massacrer sans crainte.Au nom de l’HumanitéL’œuvre d’assassinat est sainte.« Au bon carnage ! Tous en chœur !Taïaut ! Taïaut ! Chiens de Bonté,Braves chiens de toutes les chassesD’universelle charité. Catholiques et socialistes,Ô Pacifistes,Au nom de l’Humanité,À la guerre ! À la guerre !« Hommes de cœur,Taïaut ! Taïaut ! Traquez la raceQui ne veut pas subir la LoiCommune de votre bon Droit.Sus à la Bête meurtrière.Et pas de grâce !Pour cette fois.Vous pouvez tuer sans pitié.Ce n’est pas une guerre ordinaire.L’œuvre de Mort est salutaire. »Ô la quatrième Gueule,Le monstre s’en réjouissaitBien plus que de toutes les autres,Car ses mâchoires déchiraient,Au rythme de son discoursDe bon apôtre.Les plus beaux corpsDu jeune Amour.Ses mâchoires étaient la meuleOù se venait broyer le grainDes épis d orDe la pensée en Messidor.Et le cochon, vautrantSa panse grasseDans le sang,Digérait la blancheur du PamBéatement.Oh ! ce Monstre sur mon chemin…Où fuirai-je les cris de MortDe ses quatre gueules voracesEt la vision d’horreur obscène de son corps ?Un vol traînant de vieux corbeaux dans le[ciel passe…